13/08/17 - Le demeuré méprisé



Il y a ceux qui sont intelligents et ceux qui ne le sont pas. Les premiers vivent leur vie et décident de celle des autres, les seconds sont éxploités et parqués comme des bêtes en fonction de s'ils sont idiots, attardés, demeurés, stupides, mongoliens, etc.

Ceux qui dirigent le monde, les intelligents, ils sont pas comme nous. Ils ont un rapport au réel qu'est pas simple. Ils sont irrespectueux. Ils sont incapables de voir une seule qualité digne de respect chez qui que ce soit. Ils vivent entre eux.

Ils créent des clubs de sachants, réfléchissent à de grandes questions, prennent un ton posé, un air inspiré, se demandent bien comment l'humanité pourrait résister à leurs idées suppérieures, et dehors, les gens crèvent, le monde animal et végétal est génocidé, la planète se réchauffe, face à a leur totale indifférence.

C'est l'apocalypse ? Fort bien ! Ca sera prétexte à bander les intelligences.

Pendant qu'on boit un coca et une pizza, eux, ils se bataillent, se concurrencent, s'affrontent, se défient.

Et que le meilleur gagne !

La bien aimée est là, patiente, mouchoir en main, s'adressant avec douceur à ces cerveaux qui prennent la route de la guerre : "Que mon preu chevalier me soit rendu couvert d'honneurs. Je me donnerai à lui sans conditions".

Voilà la guerre.

Moi, je ne fais pas la guerre.

Je regarde les arbres, les herbes, j'écoute le son de la pluie, du vent, j'apprécie les ambiances, l'humidité de l'air, la fraicheur du matin. Je suis un poète ! En somme un demeuré.

Et oui, les gens comme moi sont des demeurés !
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Comment j'ai su que j'en étais un ? Comment ai-je réussis l'éxploit de prendre conscience de ma connerie ?

C'est une boite de jeu qui l'a permis : celle de World of Warcraft.

J'ai voulu, ivre de joie, celle d'avoir réussis à écrire un petit texte cohérent, lire ce qu'on pouvait bien écrire sur une boite de jeu. J'avais plusieurs fois essayé de le faire sans y parvenir, et je n'avais pour ainsi dire jamais réussis à comprendre (réellement comprendre, profondément, sans superficialité).

Je fais un effort, je lis une fois, deux fois, trois fois, et au bout de la quatrième, mon attention ne décroche plus, j'y arrive enfin.

Voilà ce qui m'a tant donné de mal : "Plongez dans World of Warcraft et rejoignez online des milliers d'autres puissants héros dans un royaume de mythes, de magie et d'aventures sans limites. Cimes enneignées, forteresses perdues dans les montagnes, ravins profonds, zeppelins survolant des champs de batailles dévastés, sièges épiques - un nombre illimité d'éxpériences s'offrent à vous."

En temps normal, ne pouvant pas lire, je me réfugie en moi-même pour penser à ce que le monde peut me transmettre de "non intelligent". Mais dans ce cas, j'ai utilisé cette petite lecture pour réfléchir.

Je me disais que la promesse qu'on faisait au joueur était à milles lieux de ce que je faisais dans le jeu. Le joueur est un héro, et plus bas, sur la boite, on nous dit qu'il doit affronter des adversaires pendant la partie, pour conquérir des territoires, gagner des combats, etc.

Or moi, dans le jeu, ce que je faisais c'était me promener. Je regardais les décors, les personnages, J'écoutais les sons d'ambiances, les musiques. En fait, j'observais le travail des artistes. Je m'attardais sur tout ce que les petites mains de l'industrie faisaient et qui passaient inaperçu aux yeux de tous. Ce qui m'intéressait c'était tout sauf le COMBAT.

Ce désintérêt pour la castagne je me suis dit que : "c'était peut-être parce que je ne voulais pas passer mon temps à lire les textes des quêtes ? Peut-être parce que je préférais les sons et images ?".

Et donc, j'ai eu, une fois n'est pas coutume, une révélation. J'ai réalisé que j'étais un demeuré.
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Oh, vous savez, je le vis bien d'être un demeuré !

Avec le recul, je comprends mieux pourquoi le niveau baissais partout où je passais. Surtout sur France Culture.

Les intelligents se disaient qu'un demeuré pouvait pas comprendre l'intelligence. Il fallait donc forcément baisser le niveau.

Et bien, je dois dire qu'il s'agit d'une erreur colossale et je m'éxplique.

Le demeuré est sensible. Il entend, voit, sent, écoute, goute, et articule sa pensée par rapport à celà. Il est capable de jouïr d'une ambiance, la reconnaitre, et sait différencier une ambiance intelligente d'une ambiance non-intelligente.

Baisser le niveau, pour un demeuré, c'est irrespectueux et méprisant. La différence entre un intelligent et un demeuré ne se fait pas en quantité et vivacité de neuronnes, mais en aptitudes mentales privilégiées.
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Je trouve donc triste qu'on en vienne à me voir comme une bête dont on pourrait observer les excréments sans que celà ne pose problème. Je trouve celà d'autant plus triste que je sais maintenant que je suis un demeuré.

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